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Pavane pour une pataugeoire défunte

Laurence Benoit
La Nation n° 2285 15 août 2025

La pataugeoire de la Campagne Guillemin, à Pully, n’est plus aux normes sanitaires actuelles et ne sera pas rénovée car sa réfection et sa surveillance engendreraient des coûts que le conseil communal ne peut se permettre d’accorder1. Cette nouvelle m’attriste et me plonge dans un accès de nostalgie, car cette petite piscine a fait le bonheur de plusieurs générations d’enfants.

Ce parc, j’y suis venue tous les étés pendant plus de dix ans avec mes trois enfants quand j’habitais un trois pièces de septante mètres carrés, au quatrième étage d’un immeuble situé non loin de là. Après l’école ou la sieste des enfants, nous partions à pied rejoindre ce lieu béni, lestés de serviettes de bain, de jeux et du goûter. Par les températures caniculaires, ce parc était un havre de verdure ombragé, un grand espace bien sécurisé, équipé de plus de jeux que la moyenne des parcs, d’un petit enclos avec des biches et surtout, cerise sur le gâteau en été, doté d’une piscine d’une taille adaptée à des enfants entre six mois et sept ans. Cet endroit était providentiel pour une mère de famille dotée de trois petits enfants assez rapprochés, qui vivait loin de sa famille et ne disposait d’aucune aide pour surveiller ces trois tourbillons hyperactifs.

Cette pataugeoire sauva ainsi une bonne partie de mes étés et ceux de mes enfants. Tous les parents savent à quel point les bambins ont du plaisir à jouer avec de l’eau, à s’éclabousser, à faire trempette quand la chaleur du soleil met les organismes à rude épreuve. Des amies m’y rejoignaient avec leurs enfants. Aux plaisirs champêtres et aquatiques, nous ajoutions les joies de la conversation et de la socialisation pour les enfants et les mamans. Par les chaudes soirées d’été, mon mari m’y rejoignait à la sortie du travail et nous pique-niquions sur la pelouse, en profitant de longues soirées rafraîchissantes et paisibles. Puis, nous rentrions mettre au lit nos enfants qui, bien fatigués par les ébats de la journée, s’endormaient sans qu’on ait besoin de les bercer.

Après une pause de vingt-cinq ans durant lesquels je n’ai plus beaucoup fréquenté le parc, j’y suis retournée les dix derniers étés avec mes trois petits-enfants avec le même plaisir pour eux et pour moi. Le parc n’avait pas beaucoup changé, l’aire de jeux était restée la même, et la pataugeoire était toujours présente.

Quelques années plus tard, m’y voilà avec mon quatrième petit-fils. Mais cette fois, adieu la piscine. Elle est vide et le restera. Même si je concède que des efforts ont récemment été faits dans l’aménagement des aires de jeux pour enfants, l’une des choses qui m’a toujours frappée est l’indigence et la monotonie de ces places: toujours le même toboggan, la même balançoire, et le même cheval (ou tout autre animal) à bascule. A croire que ceux qui les dessinent et les créent n’ont jamais été des enfants ou qu’avec l’âge adulte, ils ont perdu toute forme d’imagination. A moins que les contraintes budgétaires et sécuritaires n’entravent cette dernière. Dans cette affligeante uniformité, la pataugeoire du parc Guillemin était une originalité bienvenue qui sera intensément regrettée.

Laurence Benoit

1   A l’heure où j’écris ces lignes, une pétition électronique circule à Pully pour demander sa rénovation https://www.petitionenligne.ch/petition_pour_la_renovation_de_la_pataugeoire_du_parc_guillemin_a_pully

    Et une démarche participative initiée par la municipalité est en cours pour savoir comment faire évoluer la place de jeu et remplacer la piscine par des jets d’eau.

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