Les confréries du district d’Echallens en sursis
Les confréries catholiques et réformées du district d’Echallens ont été fondées entre le XVIIe et le XVIIIe siècles au temps des baillages communs. Les villes de Berne (réformée) et de Fribourg (catholique) administraient alternativement, par périodes de 5 ans, les 10 communes historiques du district, à savoir Echallens, Assens, Bottens, Bioley-Orjulaz, Etagnières, Poliez-le-Grand, Poliez-Pittet, Saint-Barthélemy, Malapalud et Villars-le-Terroir. Pour assurer la paix confessionnelle, une confrérie protestante et une confrérie catholique ont été créées dans chacune des communes citées, sauf Malapalud où seul existait une confrérie catholique.
A l’origine, les confréries devaient payer le régent, assister les bourgeois en difficultés financières, assurer les frais de l’école et du culte. Actuellement leurs buts sont de soutenir le culte et de développer les liens fraternels dans la communauté. Elles sont régies par des statuts qui leurs sont propres et elles fonctionnent en parallèle aux paroisses protestantes ou aux associations paroissiales catholiques1.
L’article 179 al. 8 de la Constitution cantonale actuelle maintient la garantie constitutionnelle que la Constitution du 1er mars 1885 accorde à certaines institutions du district d’Echallens, notamment les confréries catholiques et protestantes, dénommées ici «bourses publiques». Cette disposition précise que ce régime coutumier particulier continue d’être garanti tant qu’il n’est pas modifié par la loi2.
Selon l’article 183 de la loi sur les communes, les hameaux de Payerne et les confréries du district du Gros-de-Vaud sont traités par analogie comme des fractions de commune, notamment au point de vue de la surveillance de leur gestion et des règles relatives à la disposition de leurs biens. Les fractions de commune sont créées et dissoutes par décret du Grand Conseil (article 129 de dite loi).
Venons-en à l’actualité: dans le cadre de la révision complète de la loi sur les communes, le Conseil d’Etat projette de dissoudre les confréries religieuses du Gros-de-Vaud et les hameaux de Payerne3.
Selon le rapport explicatif de l’avant-projet de loi, s’agissant des confréries et des hameaux de Payerne, «rien ne justifie aujourd'hui de leur accorder un statut de collectivité publique»4. Ainsi, «sauf omission, ces entités ont aujourd'hui été relevées de l'ensemble des devoirs légaux qui leur incombaient» et l’administration de rappeler que «ces entités existaient généralement avant les communes sous leur forme actuelle et que leurs avoirs sont souvent d'origine privée».
Nous ne sommes pas expert en la matière et ne savons pas si des motifs pratiques déterminés commandent de s’opposer à la dissolution de ces confréries de droit public.
Cela étant, aucun motif impérieux ne semble exiger la suppression de ces antiques corporations qui appartiennent au patrimoine institutionnel, juridique et religieux du Pays de Vaud.
L’esprit égalitaire ne tolère pas les particularismes locaux qui font pourtant la richesse des territoires.
A une époque où la juste distinction et la saine collaboration entre Eglises et Etat sont parfois contestées, le régime actuel devrait s’accommoder de ces anciennes institutions encore vivantes, instaurées par nos aïeux pour garantir la paix confessionnelle.
Xavier Panchaud
1 A titre d’exemple, l’article 1 des Statuts de la Confrérie catholique d’Echallens dispose que dite Confrérie «est le corps administratif de la paroisse. Elle en représente la population catholique romaine».
2 GARDAZ Philippe, Le statut des Eglises et communautés religieuses dans la nouvelle constitution vaudoise, in FVRR N. 36, p. 6.
3 Les hameaux de Payerne sont depuis 1854 une fraction de commune qui gère des terres. Son origine remonte au XVIe siècle lorsque l’abbaye de Payerne céda des droits d'usage dans les forêts du couvent aux habitants des «Villages d'en-haut» de Payerne.
5 Ibidem.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- La colline grignotée – Editorial, Félicien Monnier
- Ravel – Jean-Blaise Rochat
- Il faut reparler de prévoyance vieillesse! – Jean-Hugues Busslinger
- Le modèle de prévoyance vieillesse du Centre Patronal – Quentin Monnerat
- Chronique sportive – Antoine Rochat
- Le mal et le moindre mal – Olivier Delacrétaz
- La beauté au milieu des ruines – Jean-Blaise Rochat
- Les finances hors de contrôle – Jean-François Cavin
- Robots et lansquenets – Jacques Perrin