Identification
Veuillez vous identifier

Mot de passe oublié?
Rechercher


Recherche avancée

Il faut reparler de prévoyance vieillesse!

Jean-Hugues Busslinger
La Nation n° 2277 18 avril 2025

L’avenir de la prévoyance vieillesse continue de mériter une attention soutenue. On le constate, de nombreux blocages subsistent, tandis que le vieillissement de la population impose de rechercher des solutions sur le plan financier. Nonobstant la hausse des cotisations salariales en 2020, l’augmentation de la TVA ainsi que le progressif relèvement de l’âge de la retraite des femmes depuis 2024, la situation reste préoccupante. Et le scrutin de mars 2024 accordant une 13e rente alourdira encore les dépenses. La correction des chiffres erronés de l’Office fédéral des assurances sociales, donnant certes des prévisions moins pessimistes de l’avenir financier de l’AVS, n’a pas contribué à ramener la sérénité, ni à rassurer sur l’avenir: les résultats de répartition de l’AVS passeront dans le rouge dès 2026 et continueront de se péjorer pour atteindre un déficit de l’ordre de 6 milliards de francs par an en 2035. Si le fameux «trou de la sécu» français connait des profondeurs abyssales, celui qui se prépare dans notre pays s’annonce tout à fait respectable.

 

Un défi démographique et financier

Il n’est certes pas inutile de rappeler l’importance du défi démographique que nos institutions de prévoyance doivent affronter. L’espérance de vie à 65 ans ne cesse d’augmenter: si elle était en 1970 de 13,3 ans pour les hommes et de 16,2 ans pour les femmes, elle atteint en 2023 20,3 ans pour les hommes et 22,8 ans pour les femmes; l’augmentation va de 40 à 50% selon le sexe. Cela signifie verser des rentes plus longtemps. D’autre part, le ratio entre actifs et retraités continue à se réduire, en raison d’une entrée dans la vie active de plus en plus tardive et d’un taux de fécondité en berne, ce d’autant plus que les fortes cohortes de babyboomers arrivent à l’âge de la retraite. Ainsi, vu le système de répartition appliqué par l’AVS, un nombre moindre de travailleurs doit financer un nombre accru de rentes et ceci durant plus longtemps. Le deuxième pilier n’est pas logé à meilleure enseigne puisque les rentes doivent aussi être servies sur une durée de plus en plus longue, alors que les rendements attendus du marché des capitaux ne s’annoncent certainement pas en hausse.

Face à cette situation inquiétante, les blocages demeurent nombreux. L’âge de la retraite est presque devenu un tabou en Suisse, alors que dans les autres pays d’Europe le seuil s’élève progressivement. Le taux de conversion dans le deuxième pilier est presque aussi conflictuel. Toujours fixé à 6,8% (un capital à la retraite de 100 000 francs génère 6 800 francs de rente annuelle), ce taux est bien trop élevé en regard des possibilités de rendement offertes sur le marché. Enfin, il convient de trouver des solutions pour mieux répondre aux nouvelles formes de travail, notamment multiplication des temps partiels, pluralité d’employeurs etc.

 

Changer de paradigme est nécessaire

Pour trouver une issue, un véritable changement de paradigme est nécessaire. Le moment est favorable puisque l’administration fédérale est à l’œuvre pour présenter d’ici fin 2026 des plans de stabilisation de l’AVS. Dans ce contexte, le projet présenté fin février par le Centre Patronal – qui gère une caisse AVS et plusieurs institutions de deuxième pilier – représente une base de travail adéquate (voir l’article de Quentin Monnerat ci-dessous).

L’idée préalable de ce modèle est d’abandonner l’âge terme de 65 ans au profit d’une durée de cotisation minimale pour obtenir la rente entière: ceux qui entrent tôt dans le monde du travail peuvent aussi partir plus tôt en retraite. Pour dépasser les clivages partisans et avoir une quelconque chance de réunir une majorité, la recherche d’un équilibre est indispensable. Ainsi, le financement de l’AVS repose sur une égalité (ou une pluralité) de sacrifices et tous les moyens à disposition doivent y contribuer: cotisations salariales, TVA et élévation progressive de l’âge terme. Le mécanisme comporte des clauses dynamiques permettant de modifier le curseur si les circonstances l’exigent.

Dans le deuxième pilier, la modernisation du système passe par l’abandon de la déduction de coordination (une mesure qui permet aux bas salaires de se constituer un capital retraite plus important), par la réduction du taux de conversion compensée par des mesures équitables et par l’adoption de taux de cotisation moins pénalisants pour les travailleurs plus âgés.

Ce projet offre la possibilité de sécuriser la prévoyance vieillesse pour les décennies à venir. Nos parlementaires seront bien inspirés de lui accorder la plus grande attention.

Vous avez de la chance, cet article est en accès public. Mais La Nation a besoin d'abonnés, n'hésitez pas à remplir le formulaire ci-dessous.
*



 
  *        
*
*
*
*
*
*
* champs obligatoires
Au sommaire de cette même édition de La Nation: